Et quid du phosphate qui permet de fabriquer des batteries lithium fer phosphates ?
Le lithium-fer-phosphate, la plus sûre des technologies de batteries au lithium
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PAR PHILIPPE PASSEBON PUBLIÉ LE 01/07/2016 À 10H09
François Duchateau, Pdg de Slat.
SUR LE MÊME SUJET
François Duchateau, président directeur Général de SLAT, une entreprise française spécialisée dans l’alimentation électrique continue de sécurité des bâtiments et des infrastructures, revient sur les inquiétudes liées à la sécurité des batteries au lithium et compare les différentes technologies de batteries lithium, leurs avantages et défauts respectifs.
Le basculement de la technologie des batteries vers le
lithiumest né d’une directive européenne destinée à protéger ses citoyens des effets nocifs des métaux lourds sur la santé. Ainsi le cadmium qui était très largement diffusé au début des années 2000 - les fameuses batteries
CadNi (ou NiCad en anglais) - s’est retrouvé banni des applications grand public.
Développées à partir des années 90, les batteries à base de lithium se sont rapidement démocratisées, et se sont quasi totalement substituées aux batteries CadNi, avec des avantages écologiques certains par rapport aux batteries au plomb ou au cadmium.
Pourtant, récemment et en dépit de sa large diffusion, le lithium a été classé parmi les marchandises dangereuses. Des mesures surprenantes et potentiellement anxiogènes ont été prises par l'Association internationale du transport aérien (
IATA), qui régule le transport aérien, pour interdire aux passagers de mettre leurs appareils électroniques avec batterie dans les bagages en soute.
Pourquoi un tel succès ?
Le succès du lithium dans les batteries tient dans trois avantages. D’une part, la densité d’énergie stockée dans les batteries à base de lithium est plus importante que celle des batteries nickel-cadmium, ou celle de leurs remplaçantes éphémères, les batteries nickel-hydrure métallique (
NiMH). D’autre part, le lithium est un métal très léger. Enfin, ces batteries lithium ne présentent pas d’effet mémoire, contrairement au CadNi, qui obligeait à décharger complètement la batterie pour la recharger sous peine de perdre en capacité. Ces trois avantages - densité, légèreté, effet mémoire - ont largement contribué au déploiement fulgurant du lithium dans les ordinateurs portables et les téléphones.
Les déboires du lithium
Pourtant, ces dernières années nous avons assisté à plusieurs affaires retentissantes d’alertes de consommateurs ou de rappels de produits. On se souvient du premier rappel massif de 6 millions de batteries par
Sony en 2006. Mais des annonces ont été faites par d’autres constructeurs en 2006, 2008, 2014... Parmi les derniers en date,
Toshiba a annoncé début 2016 un rappel de 100 000 batteries d’ordinateurs produites entre 2011 et 2015 par crainte de surchauffe pouvant entraîner brûlures ou risque d’incendie.
Faut-il parler d’UNE technologie lithium ?
Les autorités, par mesure de précaution, ont tout mis dans le même sac, résumant la situation à un manichéen lithium-ion = danger. En réalité, il existe de nombreuses technologies de batterie à base de lithium, avec chacune leur domaine de pertinence, leurs avantages et leurs inconvénients. Faisons un rapide tour d’horizon :
- La batterie lithium-cobalt (LiCoO2) présente aujourd’hui la plus forte densité énergétique entre les différentes technologies lithium. Parmi ses avantages, nous pouvons citer l’absence d’effet mémoire et une très faible autodécharge, ce qui permet en théorie de la garder longtemps en stockage. Elle a conquis l’univers des ordinateurs portables, des téléphones, et c’est également elle qui équipe les Boeing 787 « Dreamliner ». Vous l’aurez deviné : c’est une batterie capricieuse... Elle requiert de grandes précautions pour sa charge. Un mauvais équilibrage des cellules, et la batterie surchauffe, voire explose ! Après deux incendies d’avion, heureusement sans perte humaine, Boeing et ses partenaires ont reconçu totalement le BMS (battery monitoring system) qui gère l’équilibrage des éléments de la batterie, surveille la température et assure la déconnexion si la tension est trop basse. Une protection mécanique est aussi nécessaire pour éviter les chocs. En effet, une structure interne endommagée ou une perforation peut provoquer un incendie.
- La batterie lithium-cobalt-aluminium (LiCoAl), proche de la précédente en termes de performance, équipe les véhicules électriques de la marque Tesla. De faible impédance interne, elle permet des décharges importantes, nécessaires pour les accélérations impressionnantes de ces bolides. De la même façon, elle autorise des recharges à des courants importants, limitant la durée de recharge. Des cas d’incendie de ces voitures ont été rapportés, mais il semble qu’il s’agisse, dans les trois cas connus, d’un court-circuit accidentel des bornes de la batterie. Une batterie stocke de l’énergie et, quelle que soit sa technologie lithium, plomb ou autre, mettre les bornes en court-circuit, provoque un soudain dégagement de chaleur par effet joule.
- La technologie lithium-manganèse-cobalt (LiMnCo), toujours dans les véhicules électriques mais aussi dans certains outils portatifs, est choisie pour sa durée de vie et sa plus grande stabilité que la batterie précédente. General Motors l’a sélectionnée pour sa gamme de véhicules électriques. Mais c’est une batterie qui supporte mal les températures supérieures à 50°C. Tesla a donc préféré cantonner cette technologie aux batteries stationnaires de stockage pour les particuliers, car elle prend un volume supérieur à capacité égale. Ces batteries présentent encore le risque d’incendie, voire d’explosion que l’on reproche aux batteries lithium-cobalt.
- La batterie lithium-métal-polymère (LMP) équipe la Bluecar de Bolloré. Elle ne présente pas de risque d’explosion mais possède un rapport capacité/poids relativement modeste de 110 Wh/kg, ce qui reste tout de même près de trois fois supérieur à la batterie plomb. C’est une batterie « chaude » qui nécessite une température de 80°C pour fonctionner.
- Le lithium-fer-phosphate (LiFePO4), enfin, a été largement adopté par l’industrie. Certes, cette technologie ne permet pas d’atteindre les rapports capacité/poids des technologies au Cobalt (120 Wh/kg contre 200 Wh/kg pour les lithium-cobalt), mais elle est d’une très grande stabilité, sans risque d’incendie ou d’explosion, même avec un BMS élémentaire. Cette batterie se caractérise également par le grand nombre de cycles charge-décharge admissible, environ 3 000 décharges contre quelques centaines pour la plupart des batteries commercialisées (lithium ou plomb). Elle présente de surcroît une caractéristique particulière, une sorte d’effet mémoire inversé : moins la décharge est importante, plus le nombre de cycles est important, ce qui la rend particulièrement insensible au microcyclage. Pour finir, elle supporte plutôt bien les températures ambiantes extrêmes, de 0° à 60°C. Avec un BMS de qualité, c’est une batterie très fiable, capable d’assurer son service pendant de nombreuses années.
En résumé : choisir une batterie LiFe pour une vie plus sûre
Les technologies à base de lithium restent un territoire de recherche intense qui nous promet de faire émerger des batteries avec des densités toujours plus importantes. Nous l’avons vu : toutes les technologies de batterie lithium ne sont pas égales. Des technologies lithium cobalt, produites avec des procédés mal maîtrisés, utilisées avec des BMS rudimentaires pour la construction de jouets, conduisent aux épidémies d’incendies accidentels des «
Hoverboards » qu’ont connu les
États-Unis récemment. Les restrictions appliquées au transport des batteries Li-ion en général pourraient pénaliser leur développement. Or, ces restrictions sont injustifiées pour certaines technologies telle la lithium-fer-phosphate qui ne présente pas de danger mais des caractéristiques enviables pour la transition énergétique du bâtiment et de l’industrie.
François Duchateau
https://www.industrie-techno.com/le...es-technologies-de-batteries-au-lithium.44982