Après, évaluer le nombre de morts que les déchets pourraient éventuellement causer au cours des millions d'années à venir, c'est coton ! Il y a trop de variables pour y parvenir. La première : risque de mouvement tellurique dans le sous-sol susceptible d'avoir un impact important sur la radioactivité en surface et dans les nappes phréatiques, est en elle-même déjà un vrai casse-tête j'imagine.
Et l'humain a du mal à se projeter plus de 100 000 ans en avant
En fait tu es tombé juste avec les 100.000 ans : c'est justement le temps qu'il faut pour que les "pires" déchets retrouvent le niveau de radioactivité du minerai d'uranium original. C'est la durée pour laquelle la solution doit être conçue.
Le risque de mouvement tellurique est à peu près nul, ou aussi faible qu'on peut espérer. La couche d'argilite de Bure n'a quasiment pas bougé en 160
millions d'années. C'est 1600 fois plus long que le "besoin". En géologie, 100.000 ans c'est un clignement d’œil.
Les risques les plus vraisemblables sont ceux lors des manipulations lors de l'insertion des colis, puis le fait que dans les 100.000 ans qui viennent un monsieur pense que c'est une bonne idée de forer à cet endroit précis. L'ANDRA s'est assurée que cet endroit ne contient aucune ressource utile, mais de ce point de vue on ne peut pas anticiper. Il y a 200 ans on pensait que les déserts irakiens ne contenaient rien d'utile. Il y a 100 ans, le Kazakhstan ne se doutait pas qu'on allait y chercher de l'uranium. Donc c'est "le" risque à long terme.
Certains pensent qu'il faut inventer des formes de communication compréhensibles dans 100.000 ans à base de pierre gravée et de visages humains exprimant l'angoisse. Certains pensent qu'il faut inventer des légendes et des contes qui désignent le sous-sol du coin comme tabou, et espèrent que ces contes survivront dans le folklore des civilisations locales à venir. D'autres pensent que des gens qui forent à 500m auront la technologie pour détecter des rayonnements. Et encore d'autres pensent que c'est un risque à courir pour nos descendants : le gain pour la population en termes de réchauffement et émissions de particules justifie le risque potentiel supplémentaire pour les mineurs du futur (parce que le métier de mineur est déjà très dangereux en soi). On a 100 ans ou plus pour décider.
Ceci étant dit, pour le barrage chinois je ne sais pas, mais pour Tchernobyl il est clair également pour moi que la nature du système soviétique alors en place porte une responsabilité dans les causes de cette catastrophe comme dans son traitement...
Mais il n'est pas sûr que
ce qui s'est passé à Three Mile Island permette de conclure que le système "non administré", c'est quand même bien mieux. On avait échappé à bien pire, tel que c'était parti (comme à Tchernobyl d'ailleurs).
C'est à la fois vrai et pas tout à fait. La centrale de Leningrad avait subi en 1975 un accident ; le rapport d'analyse a déterminé les causes et a proposé des modifications de design qui auraient évité Tchernobyl. Résultat : les auteurs ont été punis et le rapport censuré. Il ne faisait pas bon ne serait-ce qu'impliquer que l'appareil d'état avait pu se tromper. En URSS le scientifique était mis en avant dans la propagande, mais il n'était absolument pas au-dessus du Parti, bien au contraire.
Je crois que c'est Gorbatchev qui a dit que seul l'URSS pouvait provoquer un accident de cette ampleur, et seul l'URSS pouvait mettre en œuvre les moyens pour le gérer.
Mais ça ne signifie pas que les non-communistes sont nickel. Avec le recul il paraît clair que régulateur du nucléaire japonais était beaucoup trop complaisant (pour ne pas dire corrompu) avant Fukushima et a plié devant un industriel bien connecté au gouvernement. Là aussi des rapports préconisaient de rehausser les digues, mais ça coûtait de l'argent... Dans les pays capitalistes, le problème n'est pas l'état, c'est le manque de contrôle de l'état devant des entreprises mises sous pression financière. Ceci dit, les accidents de Fukushima et Three Miles Island ont été dix à dix mille fois moins impactants que Tchernobyl, ce n'est pas comparable.
Enfin, les chinois ont aujourd'hui un des parcs les plus gros au monde, et c'est aussi le pays qui n'a pas subi d'accident majeur (même s'il est possible qu'ils ne les déclarent pas, ils seraient détectés par un pays voisin, tout comme Tchenobyl l'a été).
En réalité, la nature et la faible fréquence des accidents graves rend toute généralisation très compliquée....